Qui peut se targuer de n’avoir jamais expérimenté le manque de confiance en soi ? Même les plus solides d’entre nous y sont confrontés un jour ou l’autre. Car nous avons tous des parts blessées en nous. Ces blessures proviennent de notre enfance, de notre éducation, des milieux dans lesquels nous avons évolué, des mots qui ont été posés sur nous, de nos propres expériences … Les origines en sont multiples, mais nos conditions de travail peuvent soit les accroître, soit les diminuer. Il n’existe aucune fatalité ; le monde du travail n’est pas une tragédie grecque où l’employé serait sacrifié sur l’autel d’un Moloch au service duquel se mettrait le manager. Cessons d’épuiser nos forces en blocages internes et en tensions externes, prenons soin de l’enfant blessé qui est en nous et changeons nos regards, sur soi et sur l’autre, pour transformer le manque de confiance en soi.
Dans un épisode de la série française Le bureau des légendes, une nouvelle recrue de la DGSE demande à Malotru, l’agent expérimenté, s’il lui est jamais arrivé « de se prendre pour une merde. » Celui-ci de répondre à la jeune femme : « me prendre pour une merde, non, mais avoir fait de la merde, oui. » Voici un exemple d’intelligence émotionnelle : oser regarder ses faiblesses ou ses erreurs sans les nier mais ne pas pour autant diminuer sa propre valeur ni en tirer une loi générale.
En plus d’un retard de croissance, je me sentais en manque de reconnaissance de mon père
Du vilain petit canard à l’homme épanoui
Au cours de mon enfance, je me suis longtemps vu comme un vilain petit canard, celui que le conte d’Andersen décrit comme différent des autres et que le groupe rejette, car il paraît « anormal ». Mon enfance n’a pas été insouciante, à cause d’une maladie cœliaque manifestée dès après mon sevrage.
En plus d’un retard de croissance, je me sentais en manque de reconnaissance de mon père. Dissipé, turbulent et mal dans ma peau, je ne répondais pas à ses attentes, à l’inverse de mon jeune frère, qui avait les faveurs paternelles. Malgré les bonnes choses qui pouvaient m’arriver, je nourrissais un manque de confiance en moi qui m’entraînait dans une spirale négative, jusqu’à ce que je décide de prendre mon destin en main.
C’est vers l’âge de douze ou treize ans que j’ai décrété que la maladie ne m’empêcherait plus de vivre et que je réaliserais mes rêves. J’ai travaillé dur pour cela et me suis entrainé pendant des années plus que bien des autres, jusqu’à devenir, plus tard, un agent respecté du service action de la DGSE, puis, des années après, à commander la première unité des forces spéciales françaises envoyée en Afghanistan à l’automne 2001.
De réussite en réussite, j’ai (re)trouvé la confiance en moi. Aujourd’hui, je me sens pleinement serein parce que l’homme que je suis devenu répond aux rêves, même les plus flous, de l’enfant que j’ai été. Je me sens, ainsi, réaligné sur mon axe intérieur. Cela, je le dois aussi aux rencontres que j’ai faites et aux personnes qui m’ont accordé leur confiance.
C’est notamment parce que d’autres m’ont fait confiance, supérieurs hiérarchiques ou équipiers, que j’ai pu avancer sur ce chemin et transformer mon image de moi. Mais c’est parce que j’en ai d’abord fait l’effort que j’ai pu obtenir leur confiance.
Nous devons apprendre à nous dégager de l’emprise des croyances limitantes que nous avons emmagasinées
Corriger les croyances limitantes
L’environnement familial, éducatif et professionnel peut être cause d’un manque d’estime ou de confiance en soi, qui constituera un obstacle à l’épanouissement personnel et à l’évolution professionnelle. Et les blessures de l’enfance, qui ne sont pas proportionnelles aux réalités vécues mais perçues, créent des croyances et des mécanismes de fonctionnement qui finissent parfois par nous enchaîner.
C’est notamment le cas du syndrome de l’imposteur, qui pousse la personne qui en est victime à douter constamment d’elle-même, de ses capacités et même de ses réussites, en niant systématiquement tout accomplissement personnel, rejetant ses propres succès sur des facteurs extérieurs, tels que la chance ou les circonstances actuelles, et refusant de s’en attribuer le mérite.
Finalement, un châtiment lourd et épuisant, pour un crime qui n’a pourtant pas été commis.
Nous devons apprendre à nous dégager de l’emprise des croyances limitantes que nous avons emmagasinées au fur et à mesure de nos expériences et des messages qui nous ont été adressés. « Je n’y arriverai jamais », « je ne suis pas compétent », ou « je n’ai pas de chance », sont des phrases tellement courantes qui renforcent le manque de confiance en soi et nous maintiennent dans une spirale négative.
A force de se les répéter, on finit par les croire inconsciemment et par les ancrer en nous. L’affirmation négative, comme l’affirmation positive, procède du cœur. A nous de choisir laquelle nous préférons. Le préalable est de le faire en conscience, c’est-à-dire en connaissance des effets de la vibration de ces pensées sur nos corps et sur l’issue des situations.
La confiance en soi peut se renforcer ou se dégrader selon la forme de management pratiqué dans l’organisation
Adopter un management positif
Dans les organisations aussi, le niveau de confiance est très faible. Pourquoi ? J’ai appris de l’ensemble de mon expérience professionnelle qu’il existe un lien étroit entre confiance et performance. Jim Burke, ex président directeur général de la multinationale Johnson & Johnson disait que « la confiance est la clé absolue d’un succès à long terme ».
Pourtant, une étude du cabinet Willis Towers Watson auprès de 31 000 salariés dans le monde a montré, en 2014, que seuls 45 % faisaient confiance à leur direction.
Il n’y a aucune fatalité face à cet écart majeur entre l’importance accordée à la confiance par chacun (direction ou salarié) et la réalité vécue dans bon nombre d’organisations. Nous savons bien, en outre, que la confiance met davantage de temps à se construire, jour après jour, qu’à se briser.
De la même manière, la confiance en soi peut se renforcer ou se dégrader selon la forme de management pratiqué dans l’organisation. Il incombe donc aux dirigeants et managers d’être attentifs à leur manière d’être et de manager leurs collaborateurs. C’est parfois difficile, compte tenu des multiples paramètres de l’environnement avec lesquels il convient de composer aujourd’hui, et du stress que ressentent bien des managers dans cette période de mutation.
La confiance est un enjeu de performance de toute organisation. Pour les dirigeants, il importe d’aider leurs managers à prendre conscience de leur rôle central dans le renforcement de la confiance, en soi et au sein de l’organisation. Cela implique nécessairement un travail sur la posture, qui doit partir du plus haut niveau de la pyramide hiérarchique.
Cela passe, aussi, par le développement de la pratique du feedback, qui vise à aider la personne à progresser. Mais on ne peut y parvenir que si l’on parvient à porter un regard bienveillant sur la personne, qui l’aidera à trouver le chemin vers ses axes d’amélioration et à changer de regard sur elle-même.
Aider une personne à transformer ses croyances limitantes, tel est, notamment, le rôle d’un coach. C’est aussi celui de tout leader, dans sa dimension de leader-accompagnateur.